La réalité est une fiction très mal écrite

Réalité 2025
Prod : Capital Films
Réal : Lana et Lilly Fachowski

Note de la rédaction : 0/5

Réalité 2025 est une œuvre atone, boursouflée de prétention, oscillant entre farce absurde et tragédie indigeste. On y retrouve tous les motifs éculés du thriller géopolitique à grand spectacle, mais sans la moindre cohérence dramaturgique. Ses antagonistes sont caricaturaux au point de défier toute suspension d’incrédulité, ses rebondissements sont d’un grotesque confondant, rappelant le déjà très mauvais Réalité 1939.

Le problème principal de cette fiction désastreuse ? Son incapacité à masquer la mécanique grossière qui l’anime, exhibant sans vergogne son écriture paresseuse et accumulant des incohérences dignes des pires productions nanardesques. Ici, le Mal est absolu, univoque, sans nuance, sans fêlure, sans la moindre tension dialectique. Un pur produit du manichéisme contemporain, où les puissant-es n’ont d’autre ambition que de dévorer le monde avec une avidité infantile, lestés d’un nihilisme crasse.

Un scénario incohérent et répétitif

Ce qui plombe définitivement Réalité 2025, c’est son scénario. On aurait pu pardonner les personnages fades si l’histoire tenait un tant soit peu la route, mais hélas, c’est un enchaînement indigeste de scènes absurdes.

L’intrigue principale ? Un groupe de puissant-es veut toujours plus d’argent, de pouvoir et de contrôle, mais sans raison valable. Ils possèdent déjà tout, mais trouvent malgré tout que ce n’est pas suffisant. Leur objectif ? Détruire la planète, non pas par accident, mais volontairement, juste pour voir ce que ça fait. Ils empoisonnent les sols, incendient les forêts, transforment les villes en prisons numériques sous surveillance généralisée. Pourquoi ? Aucune idée. Juste parce que.

Et comme si ça ne suffisait pas, l’intrigue secondaire nous balance un subplot sur des milliardaires qui veulent coloniser Mars plutôt que de s’occuper de la Terre. Elon Fusk, ingénieur fou défoncé à la kétamine et faisant des saluts nazis (point Godwin activé en 3 minutes, comme c’est original), décide qu’il est plus simple de terraformer une planète morte que de réparer celle qu’il exploite. Le personnage manque clairement de profondeur et ressemble à un Tony Stark du pauvre, sans le charisme et l’intelligence…

Ajoutez à ça une intelligence artificielle qui commence à remplacer les travailleur-euses sans que personne ne trouve ça bizarre, une caste de scientifiques qu’on traite comme des prophètes apocalyptiques, et une partie de la population zombifiée en train de lire cette critique la tête baissée sur leur téléphone… mieux ne vaut pas avoir peur du vide.

Des méchant-es dignes d’un mauvais cartoon

Dans le genre des super-vilain-es raté-es, difficile de faire pire que Donald Grump. Chez la plupart des producteur-ices un tant soit peu sérieu-ses, son personnage aurait été supprimé dès la première lecture du script. Trop caricatural, trop outrancier, trop grotesque pour être crédible. Son introduction dans l’intrigue ressemble à une mauvaise blague : un milliardaire vulgaire, narcissique et inculte, ancien animateur de télé-réalité, qui réussit à devenir président des États-Unis. Deux fois. Même après avoir déclarer que les migrant-es mangeaient des animaux domestiques… Et pourquoi pas Cyril Hanouna aux présidentielles de 2027 ?


Boutine, lui, fait office de méchant de James Bond version discount, mélange entre un vieux tsar et un ex-agent du KGB. Son arc narratif suit un schéma déjà vu, avec un twist qui le rend encore plus caricatural : il prétend combattre le nazisme en s’entourant de milices néo-fascistes, affirme défendre la souveraineté tout en colonisant ses voisins, et promeut une morale conservatrice en dirigeant un régime gangrené par la corruption et l’oligarchie. Un parfum de guerre froide pas très original si bien qu’on en vient à se demander si les scénaristes visent l’hommage outrancier ou la parodie bas de gamme ?

On pourrait s’attarder sur de nombreux autres personnages comme Javier Milei, sorte de Joker libertarien sous coke. Une aberration scénaristique qui semble avoir été greffée au script à la dernière minute pour ajouter une touche de fun.

Plus caricatural encore : Benjamouine Nantajalou ; incarnation grossière du diable capable d’exploiter les souffrances de son propre peuple pour justifier l’extermination d’un autre. La scène où il invite le Rassemblement National français, fondé par des SS, pour lutter contre l’antisémitisme est clairement le moment où la narration va trop loin. Franchement, qui serait capable de mordre à cet hameçon scénaristique grotesque où la dignité devient une monnaie d’échange indexée aux seuls intérêts de prédateur-ices trop cruel-les pour être crédibles !? On en vient à se demander pourquoi la presse soutien encore ce genre d’imposture.

Et parce qu’on n’avait pas encore assez de figures antipathiques, les scénaristes ont jugé bon d’ajouter, pour la version française, un personnage de despote « éclairé » par et pour lui-même, façon monarchie présidentielle : Emmanuel Macaron. Digne héritier du pathétique Louis XIV, mais avec la posture d’un manager de start-up qui aurait trop regardé House of Cards. Sa spécialité ? Des monologues ampoulés où il cite des philosophes de façon erronée et prend des airs inspirés devant une cour de pubards en costard/baskets. Un méchant prétentieux, brandissant la république et le démocratie quand ça l’arrange mais qui ne respecte pas le résultat des élections et préfère s’allier avec des fachos plutôt qu’une gauche modérée. Ne parlons pas non plus de ses soutiens, de vieux milliardaires blancs et maigrelets dont l’avarice sans limite renvoi directement au très caricatural Mr. Burns de Matt Groening.

Un univers bâclé, sans âme ni subtilité

Si l’histoire est bancale, l’univers du film ne rattrape rien. Où est l’émotion ? Où est la beauté du monde ? Tout ce qui pourrait donner un semblant de souffle épique à cette œuvre est systématiquement détruit : la solidarité, l’amour, la liberté, la capacité à rêver. Le film suinte la résignation et l’angoisse, et on se demande si c’est une volonté artistique ou juste un manque total d’inspiration.

Même la mise en scène est ratée. Plutôt que de nous offrir des plans léchés, des moments de grâce, des instants où l’on pourrait croire que quelque chose d’humain subsiste, tout est traité avec un fatalisme pesant. La poésie ? Absente. L’émancipation ? Remplacée par des cours de développement personnel sur LinkedIn. L’amitié ? Rendue suspecte par la peur de l’autre. Tout est gris, déshumanisé, aseptisé…

Verdict : Fuyez !

Réalité 2025 est une catastrophe cinématographique. Ce film est mal écrit, mal joué, incohérent et profondément déprimant. Aucune révélation de dernière minute, aucun twist scénaristique pour nous sauver de cette purge. Le seul moyen de s’en sortir, c’est de probablement de refuser de le regarder. Quittez la salle, brûlez le script, et exigez un nouveau film, avec le casting que vous mériteriez d’avoir.

Le mieux serait peut-être tout simplement d’écrire un autre scénario, de l’auto-produire, voire de l’incarner à l’écran, tous-tes ensemble…

Article proposé par Comme un Démon


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Une réflexion sur “La réalité est une fiction très mal écrite

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